PROJET IPAF-FIDA du FIMI
ORGANISATION
South Central Peoples’ Development Association (SCPDA)
PARTICIPANTS DIRECTS
85
PARTICIPANTS INDIRECTS
8 152

Travail direct avec la jeunesse Wapichan dans le sud du Rupununi à travers le suivi territorial, l’administration et la protection des systèmes traditionnels de gestion agricole et forestière. Compilation des expériences des personnes aînées de la communauté dans le but de promouvoir la conservation et la transmission orale des traditions et des savoirs ancestraux.

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District de Rupununi Sud / Région 9 / Guyana
LANGUE
Wapishana
POPULATION
9 000
ALTITUDE
187 m (Aishara Toon / Aishalton)
SUPERFICIE
43 092 ha
COORDENADAS
17,113
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Dix-sept communautés composent le territoire Wapichan du sud du Guyana, l’une des régions les plus riches en biodiversité du pays. Situé à la frontière avec le Brésil, il englobe le bassin de l’Alto Essequibo et la vaste savane de Rupununi. La région comprend différents écosystèmes, y compris la forêt tropicale et la forêt tropicale sèche, où se trouvent des rivières, des montagnes s’élevant entre 305 et 915 mètres d’altitude, et des zones humides aux inondations saisonnières qui créent un passage entre le bassin versant d’Essequibo et le bassin de l’Amazone.

Les gardiens du savoir
photographies Khadija Benn
TEXTe Jorge Varela
District de Rupununi Sud / Région 9 / Guyana

« C’est à travers le langage qu’on se connecte aux autres traditions, comme le respect pour la terre et les savoirs liés à son utilisation, et la connaissance des différentes saisons, de la médecine, de l’alimentation, de l’artisanat et de la danse. » Judy Winter, âgée de 18 ans à peine, prononce ces mots pour expliquer l’importance que recèle pour elle et sa communauté la défense de leurs coutumes.

Le contraste entre l’âge de cette jeune femme et la profondeur de ses propos pourraient en surprendre plusieurs, mais cela n’a rien d’étonnant lorsqu’on écoute Judy raconter comment elle occupe son temps depuis plus d’un an : sillonner les villes et villages de sa région à la recherche de personnes aînées et « knowledge holders » (les gardiennes du savoir, comme elle les appelle) désireuses de partager ce qu’elles savent avec des jeunes qui, au grand dam de Judy, ont trop oublié.

Aishara Toon (Aishalton), le village où Judy a grandi, est une communauté d’environ 1 200 personnes du sud de la région de Rupununi, du nom de la rivière du même nom qui traverse ce territoire situé au sud-est de la République Coopérative du Guyana, ancienne colonie néerlandaise, puis britannique jusqu’en 1966. C’est le centre de quelque 21 villages satellites habités principalement par les Wapichans, l’une des neuf communautés autochtones du pays.

Dans le village, certaines personnes sont employées par le gouvernement, dans le corps enseignant ou infirmier, par exemple. D’autres, moins nombreuses, sont propriétaires de petites entreprises. Mais la majorité de la population vit de l’agriculture, de la pêche et de la chasse. Historiquement, les Wapichans ont vécu des forêts, de la savane subtropicale et des abondants ruisseaux et étangs qu’ils habitent de manière durable. Malgré tout, comme l’explique Judy, « nous avons petit à petit perdu notre lien avec nos aînés et leurs connaissances. Notre territoire est toujours aussi beau grâce à tout ce que nos ancêtres ont fait pour utiliser les ressources de manière durable; c’est ce que nous devons faire aussi.»

Les Wapichans et leurs ancêtres habitent la région appelée Wapichan wiizi depuis des générations. La population totale est estimée à environ 13 000 personnes vivant à la frontière entre le Guyana et le Brésil. Moins de 5 000 personnes parlent la langue wapishana.

Judy fait partie d’un groupe de six jeunes qui a été sélectionné par la South Central Peoples' Development Association (SCPDA) pour documenter les témoignages de personnes âgées. Le groupe a porté le projet dans plus de la moitié des villages satellites et espère pouvoir les couvrir tous.

Avec l’appui du Forum international des Femmes autochtones (FIMI) et le soutien financier du Fonds international de développement agricole (FIDA), à travers son Mécanisme d’assistance pour les peuples autochtones (IPAF), la SCPDA encourage le dialogue entre jeunes et aînées afin d’assurer le transfert des connaissances aux nouvelles générations.

Judy et ses collègues recueillent des histoires, les écrivent et les traduisent en wapishana (la langue Wapichan), le tout dans le but de rapprocher les nouvelles générations à cette langue, puisque la plupart parlent désormais seulement anglais.

Ce travail culminera vers la publication d’un livre intitulé « Histoires wapichan du sud du Rupununi », le premier du genre dans l’histoire de la langue, qui sera également publié en anglais et distribué dans les écoles, sur Internet et à la radio.

« Notre territoire est toujours aussi beau grâce à tout ce que nos ancêtres ont fait pour utiliser les ressources de manière durable; c’est ce que nous devons faire aussi. »

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(8) Les palmiers-bâches (Mauritia flexuosa) abondent le long des ruisseaux sinueux et dans toute la zone humide de Rupununi. Les Wapichan en mangent les fruits et utilisent les branches sèches pour construire les toits de leurs habitations. (9) Des peintures murales ornent le siège de la South Central People’s Development Association (SCPDA) dans le village de Shulinab, dans le centre-sud de Rupununi.  (10) Des peintures murales réalisées par Simon Peters, un artiste de Shulinab, montrent la biodiversité du territoire Wapichan.  (11) Une femme portant des vêtements de coton traditionnels tissés à la main à Kashan Creek, Aishara-Toon (Aishalton).  (12) La pêche durable est vitale pour la communauté Wapichan.

Pour Judy, ce travail peut servir de pont entre les différentes générations de Wapichans, offrant aux jeunes un outil pour comprendre toute la valeur de la vie de leurs ancêtres, chose très difficile à comprendre étant donné que leur histoire a été effacée.

Le projet va au-delà du simple transfert de connaissances techniques aux jeunes. Il s’agit de créer un sentiment d’appartenance, de réveiller la fierté d’être Wapichan; il s’agit de rejeter l’idée trop bien ancrée que leur mode de vie est dépassé et non civilisé.

Les gravures sur pierre, ou timehri se trouvant à trois kilomètres d’Aishara-Toon (Aishalton) dans les montagnes de Makatao ont plus de 3,000 ans.

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(13) Vue d’Aishara-Toon (Aishalton) depuis le mont Makatao. (14) Un alligator et une tortue représentés dans les pétroglyphes, ou timehri. (15) Judy Winter à Kashan Creek. (16) Les gravures sur pierre situées en territoire Wapichan datent de plus de 3 000 ans. (17) Peintures sur les parois inférieures d’une grotte à Shea Rock.

Le fait d’écouter les histoires des aînés et de réfléchir au passé de sa communauté a incité Judy à regarder l’avenir avec plus de détermination. Elle étudie les droits de la personne pour aider à assurer la continuité de son peuple, et rêve de systématiser les leçons tirées du projet. « Nous avons eu l’occasion de jeter les bases pour renforcer les communautés wapichan », déclare Judy à propos du projet. « Il s’agit de raviver la passion en nous. Nous savons que nos aînées ne seront pas toujours là, mais nous marcherons sur leurs traces. Nous ne serons pas toujours là non plus, mais alors nos enfants prendront la relève. »

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Distrito del Sur de Rupununi / Región 9 / Guyana